On entend souvent dire à propos de l'hypnose qu'il s'agirait d'entrer en état de transe pour accéder à "l'inconscient", pour lui demander de faire quelque chose par rapport à une situation problématique. Dans ce paradigme qui reste valide, le conscient veut quelque chose ou constate un problème et quelque chose d'inconscient en serait la cause.

Dans un autre paradigme que nous allons explorer aujourd'hui, nous allons considérer à l'inverse que l'inconscient a déjà travaillé, qu'il a déjà évolué, et que le conscient a besoin d'actualiser le changement de position déjà réalisé au niveau inconscient. Cette vision en termes d'actualisation de soi, on peut la retrouver chez Rogers, mais aussi parfois chez Erickson. Il ne s'agit pas de nier que l'on peut activer les conditions d'une réorganisation des complexités psychologiques intérieures, c'est le propre de l'hypnothérapie et de la psychothérapie, cependant, cette réorganisation pourra tout à fait avoir déjà été préparée voire complétée à un niveau caché à l'esprit conscient. L'actualisation du conscient permettra à l'inconscient de produire une nouvelle étape d'évolution qui pourra être à son tour actualisée en temps voulu.

En pratique, au niveau inconscient, nous avons souvent déjà réalisé un changement de position interne ou déjà évolué. Par exemple, si je me situe dans ce paradigme, je peux dire que le processus de réaliser un cursus de formation à la psychologie clinique ou encore une thèse, n'est pas un processus pour apprendre quelque chose que je ne sais pas déjà au niveau inconscient au sujet de la relation à soi et au monde, mais que ce processus est une façon d'actualiser un changement de position et de réalité que mon inconscient a déjà réalisé en secret, sans que mon conscient ne le sache. Ma démarche externe de formation et de doctorat devient alors le moyen par lequel le conscient réalise une modification de sa réalité externe et une actualisation de sa connaissance de soi, tout en apprenant une façon de connaitre ce que mon inconscient a déjà complété et qu'il lui enseigne. La forme de cette actualisation importe peu. D'autres formes d'actualisation que des études ou processus de recherche auraient pu correspondre à une actualisation du conscient du changement de position inconscient.

Bien sûr, l'inconscient s'adapte aux progrès du conscient. Conscient et inconscient travaillent ensemble et construisent des chemins et des réalisations que l'on peut rejoindre et emprunter. Mais, comme le disait Erickson, notre conscient est intelligent mais il est stupide comparé à notre inconscient. D'où le "vous ne savez pas", vous "ignorez"... Travailler à partir de ce paradigme d'actualisation nous oriente ainsi, non sur une demande à l'inconscient qu'il produise quelque chose, mais sur l'apprentissage que réalise le conscient à propos de soi ou du Soi, quoi que ce soit. J'apprends qu'il existe une activité inconsciente involontaire, qui se produit sans effort et sans que je puisse la contrôler. Je peux alors apprendre à communiquer, communier, être en relation à ces niveaux d'activité inconsciente. Il n'y a pas d'égalité de contribution entre conscient et inconscient. L'inconscient sait tout de ce que sait le conscient, l'inverse n'est pas vrai. Nous pouvons solliciter l'inconscient pour qu'il facilite cet apprentissage, pour qu'il montre au conscient ce qui est important à voir, ou pour qu'il continue à cacher au conscient ce qui est important à cacher afin que ce conscient ne vienne pas interférer avec des choses vraiment importantes que nous avons fait à l'intérieur de nous en prenant soin de nous cacher à nous même ce que nous avons déjà fait dans l'intimité de notre esprit. Nous pouvons certes demander à l'inconscient d'examiner les données d'une situation, mais souvent plus pour que cet esprit conscient réalise qu'il n'est pas celui qui agit et que son rôle est de suivre. Nous (conscient) venons en second.

Suivant le principe où l'inconscient a déjà travaillé, qu'il a déjà réalisé un changement de position, et que le conscient a besoin d'actualiser le changement de position de l'inconscient, l'aide proposée par le praticien n'est pas de demander à l'inconscient de faire quelque chose pour répondre à une volonté consciente mais d'aider la personne à actualiser ce que son inconscient a déjà produit comme changement de position.

Le conscient va donc réaliser une actualisation de soi et donc de sa réalité extérieure, suite à ce changement de position de l'inconscient. Cette actualisation prendra peut-être son temps et passera peut-être par un patient ouvrage de modification de notre relation matérielle au monde. Cette modification de notre réalité matérielle prend souvent plus de temps quand le conscient revendique encore un rôle de direction. Il ne s'agit pas de vouloir mais de rejoindre une volonté en nous, il ne s'agit pas de décider mais de rejoindre une décision en nous, alors le "je veux", "je décide" devient plein, entier, effectif. Il y a une volonté qui est son propre chemin et qui trouve son expression à travers chaque mouvement, chaque geste, chaque instant, chaque évènement.

Ce principe trouve des applications évidentes qu'il s'agit de découvrir dans les accompagnements où il est question de sens, de croissance de la personne, de passage dans d'autres étapes de vie, mais aussi dans toutes les situations de deuil, de séparation, de conflit. Et si nous considérons que cet inconscient est en lien avec la vie elle-même sous toutes ses formes, ce conscient peut apprendre toutes sortes de choses, à propos de toutes sortes de réalités, qu'elles soient réelles, ou irréelles. 

Pour toutes sortes de raisons, vous ressentirez probablement le besoin de revenir sur une partie du texte. Et si vous revenez sur une partie de ce texte, alors votre conscient aura démontré une envie très profonde, irrésistible, de rejoindre la connaissance que votre inconscient désire vous transmettre.